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Le 2. juin 2011 à 21h25

Sanary Economie Y aura-t-il du thon rouge sur les étals des pêcheurs cet été ?

La pêche déjà très encadrée du thon rouge ne devrait même pas avoir lieu pour les petits pêcheurs, la faute à un quota déjà dépassée par d'autres. Jean-Michel Céi souhaite se faire entendre auprès des autorités compétentes.

Jean-Michel Céi, premier prud'homme à Sanary, est inquiet pour l'avenir.

Jean-Michel Céi, premier prud'homme à Sanary, est inquiet pour l'avenir.

Le thon rouge est menacé, et de nombreuses mesures ont été prises depuis des années, mais souvent en total décalage avec la réalité des petits pêcheurs, comme l'interdiction de la thonaille (filets dérivants). Et de nombreuses décisions tendent à favoriser les thoniers senneurs au détriment de la pêche artisanale. Pour simplifier
l'ICCAT (Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique) se réunit chaque année et émet des recommandations pour la gestion du thon rouge de l’Atlantique Est et de Méditerranée puis fixe le "Total Admissible de Captures" (TAC). Cette année le TAC s'élève à 12.900 tonnes, dont près de 2.500 pour la France qui va voir son quota diminuer suite au dépassement de 2007 dont les responsables sont les thoniers-senneurs. Ce quota est ensuite réparti entre les différents professionnels. Et aujourd'hui la pêche artisanale en paie les pots cassés avec une baisse de leur quota et les conséquences se voient au niveau local. Pour se faire une idée la pêche au thon rouge, avant toutes les réglementations, représentait à l'époque pour certains patrons-pêcheurs 80% de leurs revenus. Et aujourd'hui cela avoisine les 50%, d'où leur inquiétude de voir leur revenu disparaître si cela s'avérait impossible de pêcher le thon cet été.
Jean-Michel Céi, premier prud'homme à Sanary, n'en revient toujours pas: "nous sommes huit à avoir dans le département le permis de pêche spécial (PPS) nous donnant le droit de pêcher à la ligne ou à la canne le thon rouge entre juin et octobre. En général on débute début juillet, période où les thons sont les plus nombreux, mais la saison n'a même pas commencé qu'on ne pourra pas pêcher un gramme de poisson car les quotas ont déjà été dépassés par ceux qui ont pu pêcher au palangre du côté du golfe du Lion; or nous, on ne peut pas les prendre au palangre, à cause des trop grandes profondeurs. Et au final on n'aura rien du tout". Le système actuel pourrait se résumer par cette expression "c'est le premier servi qui remporte la mise". Le quota national était de 95 tonnes de thons pour les 77 petits bateaux, tandis que les quelques 17 tonniers-senneurs peuvent se partager plus du millier et demi restant. On voudrait mettre à mal la pêche artisanale qu'on ne s'y prendrait guère mieux. A Sanary trois bateaux ont ce PPS : le Guillaume II, le Gallus et le Dragon II. Après une année difficile avec plusieurs mois sans sortie, la pêche au thon rouge était attendue: "j'ai deux marins à bord, on a notre clientèle et je ne vais pas pouvoir leur vendre du thon rouge cet été alors que nos prises sont dérisoires par rapport aux thoniers. Cela représente habituellement près de 50% de mon chiffre d'affaire ".
Elisabeth Tempier, de "l'encre de mer", rapporte dans un article sur le sujet, les propos de Didier Ranc, prud'homme de la Seyne et de Jean-Michel Céi: "maintenant qu'il y a des milliers de thons qui approchent, on va les regarder passer... Ce qui a permis de gérer nos eaux et de préserver nos territoires depuis des siècles c'est la diversification de nos engins de pêche maintenue grâce à la gestion prud'homale. L'Europe est en train de nous interdire les métiers et les espèces, les uns après les autres. C'est une gestion des stocks, conçue pour des pêches industrielles et des pêches intensives".
L'autre incompréhension de Jean-Michel Céi vient de ce constat: "chaque année les quotas baissent alors qu'il y a de plus en plus de poisson sur la côte. Nous aimerions la mise en place de quotas individuels ou par département". Devant cette situation hallucinante les pêcheurs comptent alerter le député Jean-Sébastien Vialatte et Hubert Falco. Affaire à suivre donc.

D.D, le 02 juin 2011